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Les os sur la peau
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19 juin 2013

"Est-ce que ça ne désenchante pas une sphère qui normalement devrait rester poétique et enchantée ?"

La semaine dernière je suis allée visiter l'exposition Bêtes de sexe au Palais de la découverte. Celle-ci a pour ambition d'évoquer la sexualité et la reproduction dans le monde animal. Thème a priori tout à fait intéressant. Mais voilà, plus on avance dans les explications, plus notre sang se glace à la vision de l'antropocentrisme, du sexisme et de l'homophobie dont ont fait preuve les créateurs de cette exposition. Rien que ça. Mais comment qualifier autrement des textes qui nous expliquent qu'il y a des « filles scarabées », que les canes offrent leur cœur à leur canard préféré, que certaines espèces « défient les stéréotypes de genre » (après qu'on a constaté à maintes reprises que dans la plupart des espèces c'est justement la femelle qui domine), ou encore que l'homosexualité chez les animaux ne sert à rien puisqu'elle ne permet pas de se reproduire, et qu'on peut donc expliquer ce comportement notamment par la génétique (certains gênes se révélant avoir « des conséquences bénéfiques » pour un des deux sexes, mais causant l'homosexualité pour l'autre) ? Révoltant en somme.

lapins

Tu les sens les stéréotypes de genre ?! (et en plus, ils exposent des animaux morts)

Pas étonnant donc que quand l'émission Service public de France Inter se demande « comment expliquer la sexualité aux enfants » en prenant cette exposition comme exemple tout à fait respectable, elle enchaîne les inepties. Une chose, d'abord, me turlupine : on est bien censé parler aujourd'hui de sexualité (c'est ce que prétend le titre en tout cas), pourtant pendant plus de la moitié du programme il n'est question que de « comment on fait les bébés » ; pour expliquer la sexualité aux enfants, il serait peut-être bien déjà de leur faire comprendre qu'elle n'implique pas nécessairement la procréation. Ou au moins de se poser la question si on veut leur expliquer ça ou pas. Mais non, pour les adultes présents il semble évident que sexe = bébé, et que c'est bien tout ce qui peut intéresser les gosses.

Et puis vient la gêne. Parce que oui, apparemment, ça gêne les gens de parler aux enfants de sexualité. Entre eux, prétendent-ils, ils parlent très ouvertement, mais face à un enfant ils se sentent obligés d'invoquer « la graine » et autres énormités. Quand une intervenante explique qu'on ne peut pas mentir mais qu'en même temps « on ne peut pas tout dire », Guillaume Erner lui demande si vraiment on ne peut pas mentir. Par contre personne ne se demande si vraiment, on ne peut pas tout dire. Ca, c'est évident, parce que quand on dit les choses comme elles sont « ça fait très peur », « ça désenchante ». Mais à qui cela fait-il peur ? La courte intervention de quelques enfants de 10-12 visitant l'expo semble être la plus sensée de l'émission. Eh oui, à 12 on sait ce que sont un pénis et un vagin, donc pas la peine d'essayer de rassurer vos gamins en leur parlant de graines.

Finalement, un auditeur pose une question sur la masturbation. Ouf, on ne parlera donc pas que de procréation ! Le psy s'accorde à dire que c'est normal de se masturber quand on est un enfant, par contre il insiste bien sur le fait qu'il faut « apprendre l'intimité ». Parce que quand même, il ne faut pas oublier que ces gosses sont tous des pervers polymorphes (merci Freud), alors on ne sait pas trop ce qu'ils pourraient nous inventer. Mais rassurez-vous voyons, avec des parents qui n'osent même pas prononcer les mots spermatozoïde, ovule ou phallus devant leurs enfants, ceux-ci ont peu de risques de croire qu'ils peuvent se permettre de se masturber en public.

Quand on oublie que les enfants seront des adultes et que les adultes furent des enfants, on oublie aussi de se dire qu'on forge ainsi une génération de parents aussi pudibonds que leurs prédécesseurs.

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Commentaires
A
Décidément, cette émission Service public fait rien qu'à dire des bêtises. Et puis elle a du mal avec la définition de ses sujets (cf le récent article de Loupita).
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